La catastrophe de Montceau-les-Mines

 


La date est le dimanche 3 février 1895. Le lieu : une galerie du puits Sainte-Eugénie. Les faits : un incendie.

Un barrage est mis en place pour essayer d'étouffer le feu qui se propage. Mais les efforts effectués vont se révéler vains et une explosion surgit le lundi matin. C'est le fameux "Coup de Grisou".

On dénombrera 21 morts et 7 disparus, soit 28 victimes sans compter les blessés, à savoir une vingtaine.


L'histoire bouleverse la France entière, dont les revues "à sensation" sont avides de catastrophes.


Un illustré s'indigne : "La science fait des progrès énormes et le grisou peut être évité. Pourquoi, au lieu de dépenser tant d'efforts et d'argent à trouver des engins de guerre, les savants ne s’appliquent-ils pas à trouver le moyen de préserver la vie humaine?"


"Près de 30 morts dans un nouveau coup de grisou au puits Ste Eugénie".

Telle a du être la manchette des journaux de l'époque.


En effet, le puits Ste Eugénie n'en est pas à sa première catastrophe. Il s'agit en fait de l'ancien puits Cinq-sous. Celui tirait son nom de la prime offerte aux mineurs qui y travaillaient, véritable prime de risque, car les accidents y étaient nombreux :

- Le 25 avril 1851 : 6 morts ;

- Le 29 septembre 1853 : 13 victimes;

- Le 12 décembre 1867 : 89 victimes. Emue par l'ampleur de cette catastrophe, l'impératrice Eugénie fait preuve d'une grande générosité. En remerciement, le puits Cinq-sous prend alors le nom de "Puits Ste Eugénie". Malheureusement, ce changement d'appellation ne s'accompagne pas d'une chance accrue :

- Le 8 novembre 1872 : 39 victimes;

  1. -Le 3 et 4 février 1895 : 28 victimes et une vingtaine de blessés. Mon ancêtre et un de ses fils font partie des défunts. Il s’agit de Claude GRAND (1845-1895) et de son fils Gilbert Alphonse (1877 à Doyet-03 - 1895).

  2. -Deux ans plus tard, 4 mineurs succombent dans un nouvel accident.



Parmi les autres victimes du coup de grisou, citons :

  1. -Pierre LAURENT agé de 51 ans maître-mineur, né à Ste-Radegonde, époux de Françoise VIROT

  2. -Philibert BAUDOT, 52 ans, chef de poste, né à Blanzy, époux de Pierrette MERCIER

  3. -Nicolas MARLOT, 51 ans, mineur, né St-Brizier-sous-Charmiz, époux de Marie BRUGNIAUD

  4. -Philibert BERNARD, 32 ans, mineur, né à Montceau-les-mines, époux de Lazarette GAYET

  5. -François FLECHE, 28 ans, mineur, né à St-Berain, époux de Louise FERRAND

  6. -François DURAND, 24 ans, mineur, né au Creusot, célibataire

  7. -Claude GRAND (mon ancêtre), 49 ans, mineur, né à St-Hilaire (03), veuf de Marie TAUVERON

  8. -Gilbert Alphonse GRAND, 18 ans, mineur, né à Doyet (03) célibataire (fils des feues Claude GRANDet Marie TAUVERON)

  9. -Benoit BERTRAND, 20 ans, mineur, né à Mary, célibataire

  10. -Théophile BRUGNAUD, 47 ans, mineur, né à Robiae (gard), époux de Marie LAFOREST

  11. -Philbert FOMMERAND, 48 ans, mineur, né à Hautefond, époux de françoise DEGUEURRE

  12. -Henri VACHEZ, 42 ans, mineur, né à Gérulard, époux de Claudine GUICHARD

  13. -Claude LAPRAIS, 29 ans, mineur, né à Millay (Nièvre), époux de Marie-Françoise BERTIN

  14. -Jacques LEGER, 34 ans, mineur, né à Sanvigues, époux de Françoise TOUILLON

  15. -Antoine Jules FOUILLOUX, 34 ans, mineur, né à Buxières-les-mines (Allier), époux de Jeanne-Marie BRETIGNY

  16. -Claude GUITTARD, 40 ans, mineur, né à Vaudebarries, époux de Benoite BILLOUD

  17. -Charles GABON, 44 ans, mineur, né à  St-Vallier, époux de Françoise CORNU

  18. -Jean-Marie PARIZE, 22 ans, mineur, né à Montceau-les-mines, célibataire

  19. -Jean DUVERNE, 28 ans, mineur, né à St-Eugène (71), époux de Philiberte DOYEN

  20. -Claude MERCIER, 28 ans, mineur, né à St-Bérain, époux de Anne GAUTHIER

  21. -Claude GILLOT, 35 ans, mineur, né à St-Romain-sous-Gourdin (71), époux de Eugénie BAUDOT


Le registre d’état civil mentionne à la côte 209 en date du 7 mars 1895, et tenant lieu d’acte de décès les dénommés suivants déclarés comme victimes du même accident, mais dont les corps n’ont pu être retrouvés :

«...Plusieurs des ouvriers qui ont succombé ayant pu être retirés, ont été reconnus et leurs décès ont été régulièrement constatés. Mais il résulte des renseignements fournis par la compagnie des mines de Blanzy et des enquêtes faîtes aux domiciles des mineurs que les ouvriers dont les noms suivent, y étaient descendus dans la matinée du dit jour et qu’ils n’en sont pas remontés, que, de plus, ils étaient occupés précisément dans les galeries où il est devenu impossible de pénétrer, qu’il est dès lors certain qu’ils sont morts et restés dans les galeries où ils se trouvaient. Ces ouvriers sont :

  1. -BENOIT Claude, né le 3/08/1859, à Issy-l’Evêque, époux de Jeanne RAMEAU (frère de François BENOIT ci-dessous)

  2. -LARAGE Pierre, mineur, né le 12/01/1847 au Creusot, époux d’Anne ALLIOT

  3. -POTOGNON Benoit, manoeuvre, né le 14/01/1860 à Sauvignes, époux de Marie BRELEAU

  4. -BONNARD Pierre, mineur, né le 04/04/1865 à Aluze, époux de Eugénie BONNARD

  5. -NEANT Mathieu, mineur, né le 19/04/1856 à Ternant (Nièvre), époux de jacqueline POTHERAT

  6. -RIGOLET Pierre, mineur, né le 20/02/1852 à Ecuisses, époux d’Annette BRUGNAUD

  7. -BENOIT François, mineur, né le 25/08/1856 à Uxeau (71), époux de Marie SEGAND (frère de Claude BENOIT ci-dessus)


De tout quoi, nous avons dressé le présent procès verbal en execution de l’article 19 du décret du 3 janvier 1813 et en présence des sieurs LEBAS Adolphe, 42 ans et GENEVOIS Etienne, 32 ans....»


Voici ce qu’en disait le journal de l’époque dans sa publication du 17 février 1895 :  (1ère de couverture, article interne puis 4ème de couverture).











Il semble que les sept corps fûrent retrouvés bien des années plus tard.  Ils fûrent inhumés en 1910. Une plaque commémorative fût scéllée à cette occasion (flèche) sur le monument aux morts de la mine, érigé en 1905. (Merci à Gérard S. pour ces dernières informations et ces images)